Emmanuel Macron a dénoncé mardi « l’hypocrisie » entendue « en particulier sur le continent africain » consistant à ne pas reconnaître clairement « une agression unilatérale » de la Russie envers l’Ukraine, comme le fait l’Union européenne.
« Le choix qui a été fait par les Européens premièrement n’est en aucun cas de participer à cette guerre mais de la reconnaître et de la nommer, là où je vois trop souvent de l’hypocrisie, en particulier sur le continent africain (…) à ne pas savoir qualifier une guerre » lancée par la Russie, « parce qu’il y a des pressions diplomatiques je ne suis pas dupe », a affirmé le président français dans une conférence de presse commune à Yaoundé avec son homologue camerounais Paul Biya.
Il a souligné que l’Union européenne avait décidé de « tout faire pour stopper cette guerre sans y participer » et sanctionner « la Russie pour bloquer son effort de guerre » et « l’isoler diplomatiquement ».
« C’est là où nous avons besoin de vous, parce que sinon, ce schéma (d’invasion d’un pays comme l’Ukraine, NDLR) se reproduira à l’envi. Ce n’est pas l’ordre international que nous voulons, qui repose sur la coopération et le respect de la souveraineté de chacun », a poursuivi Emmanuel Macron.
Le président français a affirmé que la France était « le pays qui s’est le plus engagé pour des États africains à leur demande pour leur sécurité » mais « dans un cadre clair, à la demande d’un État souverain et pour lutter contre le terrorisme ».
Selon lui, « ce cadre n’a plus été rempli après le coup d’État militaire au Mali ».
La tournée africaine d’Emmanuel Macron intervient à l’heure où la France a entrepris de « rénover » ses partenariats militaires sur le continent pour se maintenir dans la compétition stratégique exacerbée qui s’y joue entre puissances.
En matière d’offre militaire figurent désormais la Turquie, Israël, les Etats-Unis mais aussi et surtout la Russie qui cherche à damer le pion aux Français dans ses zones d’influence héritées des temps coloniaux, et dans le cadre d’une stratégie d’ampleur mondiale.
Poussée hors du Mali par la junte au pouvoir depuis 2020, qui travaille désormais – même si elle s’en défend – avec le sulfureux groupe paramilitaire russe Wagner, l’armée française sera partie du pays à la fin de l’été, après neuf ans de lutte antijihadiste. Sa présence au Sahel sera divisée par deux, à moins de 2.500 militaires.
Malgré ce recul, la France assure qu’elle ne renoncera pas à la lutte contre les jihadistes affiliés à Al-Qaïda et au groupe Etat islamique. Longtemps contenus au Sahel, ils gagnent aujourd’hui du terrain vers le Golfe de Guinée.
L’enjeu est fondamental: Paris entend éviter le déclassement stratégique face à ses adversaires ou compétiteurs sur ce continent qui comptera 2,5 milliards d’habitants en 2050.