Législatives en Italie: Giorgia Meloni, à l’extrême droite toute

La dirigeante du parti de droite Frères d'Italie, Giorgia Meloni, s'adresse lors d'un rassemblement alors qu'elle entame sa campagne politique avant les élections générales du 25 septembre, à Ancône, en Italie, le mardi 23 août 2022.La dirigeante du parti de droite Frères d’Italie, Giorgia Meloni, s’adresse lors d’un rassemblement alors qu’elle entame sa campagne politique avant les élections générales du 25 septembre, à Ancône, en Italie, le mardi 23 août 2022. © AP Photo/Domenico Stinellis

Giorgia Meloni, 46 ans, héritière du post-fascisme italien, pourrait prétendre à diriger le prochain gouvernement : son parti, Fratelli d’Italia, est en tête des intentions de vote, au sein d’une coalition donnée très largement gagnante.

Entrée en politique à l’âge de 15 ans au sein des mouvements de jeunesse post-fasciste, Giorgia Meloni a considérablement lissé son image extrémiste ces derniers mois, tout en soignant sa base idéologique. Elle a, par exemple, renié le régime de Mussolini et les lois raciales de sombre mémoire, mais rendu hommage à la mémoire de leur inspirateur, Giorgio Almirante. En juin dernier, elle s’est rendue en Andalousie pour apporter son soutien à la candidate du parti espagnol Vox aux régionales. Ses envolées enflammées au meeting de Marbella ont fait le tour des réseaux sociaux. Contre « le lobby LGBT », les bureaucrates de Bruxelles, la finance internationale. Pour les peuples souverains, la famille traditionnelle, « l’universalité de la Croix ».

Illusion

GIorgia Meloni, qui a pour devise « Dieu, famille, patrie », rappelle volontiers qu’elle est « femme, mère, chrétienne ». Ce qui séduit sa base. Ainsi cette sympathisante rencontrée à Bologne (qui souhaite rester anonyme, car fonctionnaire territoriale) se réjouit, elle, d’avoir « un porte-drapeau féminin dans un monde masculin, une femme qui représente les femmes de tous âges, qui malgré sa carrière politique n’a jamais oublié son passé, jamais eu honte de sa famille ni de ses origines modestes. »

Journaliste de formation, polyglotte, Giorgia Meloni a certes grandi dans un quartier populaire de Rome avec sa sœur et sa mère, après que le père issu d’un milieu aisé était parti s’installer aux Canaries. « Je comprends la fascination, décrypte Simona Lembi, candidate du Parti démocrate de centre gauche, mais il est trompeur de penser qu’une femme qui ne défend pas les autres femmes puisse les représenter. Giorgia Meloni et son parti n’ont pas voté les grands textes de loi favorables aux femmes dans notre histoire : ceux sur la santé publique, sur les crèches, sur le travail féminin. Oui, c’est vrai, c’est une femme qui prétend diriger le pays, mais sur un modèle masculin. »

Une mère plutôt à droite, un père communiste : la jeune Giorgia choisit de creuser le sillon maternel. À 15 ans, elle rejoint l’organisation de la jeunesse du MSI, Mouvement social italien, fondé en 1946 par des partisans de Mussolini. Elle préside ensuite celui d’Alliance nationale, parti fondé par Gianfranco Fini dans une optique de crédibilité gouvernementale. C’est sous la bannière d’Alliance nationale que Giorgia Meloni est élue députée en 2006. Elle rejoint plus tard le Peuple de la liberté, et Silvio Berlusconi fait d’elle la plus jeune ministre de la République, en lui confiant le portefeuille de la Jeunesse. Elle a alors 31 ans.

« Habile »

Giorgia Meloni fonde Fratelli d’Italia Frères d’Italie en 2012, et dix ans plus tard ou presque, lorsque Mario Draghi forme un gouvernement d’union nationale – en février 2021 – elle refuse d’y participer. Son parti devient alors la seule force d’opposition à droite. En fine politique, elle a su attendre son heure, analyse le professeur de sciences politiques Carlo Galli de l’université de Bologne. « Au Parlement, Giorgia Meloni avait une rhétorique populiste à la Pancho Villa, vraiment extrémiste ! Mais comme c’est une personne habile, intelligente, elle a compris qu’il valait mieux dans un premier temps, se tenir un peu à l’arrière-plan ; laisser les autres figures de la droite dure empocher les voix des électeurs, puis se casser la figure, de façon à les recueillir aujourd’hui. Elle sait très bien qu’en Italie, on ne fait pas la révolution. On se met sur des rails et on avance, bien ou mal, avec plus ou moins d’efficacité. Mais on ne fait pas la révolution. »

La stratégie est payante : Matteo Salvini a été vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur, son parti recueille à l’approche du scrutin deux fois moins d’intentions de vote que celui de sa partenaire de coalition. Et malgré des envolées « incendiaires » au Parlement, elle a toujours su manœuvrer. « Elle est très intelligente, insiste Carlo Galli. Par exemple, elle ne s’est jamais fâchée avec Silvio Berlusconi. C’est quelqu’un qui sait très bien de quel côté se trouve le pouvoir. »

Un sens politique qui sera fort utile au lendemain du scrutin à cette proche de Viktor Orban et Steve Bannon. En cas de victoire, prévisible, de la coalition, les négociations avec la Ligue de Matteo Salvini et Forza Italia de Silvio Berlusconi pour la composition d’un gouvernement seront complexes, même si Fratelli d’Italia est en tête.

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