Le président Vladimir Poutine a annoncé ce mardi lors de son discours sur l’état de la nation que la Russie suspendait sa participation à l’accord New Start sur le désarmement nucléaire. Il a aussi menacé de réaliser de nouveaux essais nucléaires si les États-Unis en faisaient d’abord.
Signé en 2010 à Prague, en République tchèque, le traité New Start sur le désarmement nucléaire, auquel la Russie a annoncé suspendre sa participation, était le dernier accord bilatéral du genre liant les deux anciens rivaux de la Guerre froide. Il s’agissait alors d’une des composantes clés de la politique du Reset, une tentative de l’administration américaine de « réinitialiser » les relations avec le Kremlin.
Réduire les arsenaux nucléaires
L’accord New Start limite les arsenaux des deux puissances nucléaires à un maximum de 1 550 ogives déployées chacun, soit une réduction de près de 30% par rapport à la limite précédente fixée en 2002. Il limite aussi le nombre de lanceurs et bombardiers lourds à 800, ce qui reste suffisant pour détruire la Terre plusieurs fois. Le traité implique aussi une série d’inspections mutuelles de sites militaires, un pilier de la politique de désarmement prônée par l’ancien président américain Ronald Reagan.
Les négociations en vue du renouvellement du traité avaient été dans l’impasse pendant toute la présidence de Donald Trump, qui voulait voir la Chine, autre puissance nucléaire majeure, être incluse dans les restrictions des arsenaux.
Moscou et la nouvelle administration de Joe Biden avaient trouvé un accord in extremis en janvier 2021 pour le prolonger de cinq ans, jusqu’au 5 février 2026, dans un climat de grande défiance mutuelle.
Un accord sur la sellette
Avant même l’invasion russe de l’Ukraine le 24 février 2022, les relations entre Moscou et Washington étaient à un plus bas depuis la fin de la Guerre froide, entre désaccords persistants sur un nombre croissant de dossiers internationaux, accusations d’ingérence électorale, d’espionnage et vague massive de cyberattaques. L’accord de prolongation avait été promptement ratifié par le Parlement russe, puis validé par Washington.
Le 9 août 2022, la Russie avait annoncé suspendre les inspections américaines prévues sur ses sites militaires dans le cadre du traité, assurant agir en réponse à des entraves américaines aux inspections russes similaires aux États-Unis.
Alors que le ton était un peu retombé à propos des menaces d’une frappe nucléaire de la Russie dans sa guerre contre l’Ukraine, une réunion avait été prévue du 29 novembre au 6 décembre 2022 au Caire pour discuter d’une possible reprise des inspections. Mais la veille de la réunion, Moscou avait annoncé son report sine die, accusant Washington d’« hostilité » et de « toxicité ». Le 1er février 2023, la Russie avait accusé les États-Unis d’avoir « détruit le cadre juridique » du traité.
Pendant la présidence de Donald Trump, les États-Unis s’étaient retirés avec fracas de plusieurs accords internationaux dont le traité INF, un autre important traité de désarmement sur les forces nucléaires à portée intermédiaire, signé lors de la Guerre froide avec Moscou.
Ce que reproche Vladimir Poutine
Le président Poutine a qualifié de « théâtre de l’absurde » le fait que l’Otan ait réclamé que la Russie applique New Start et autorise « l’accès aux inspections des sites nucléaires militaires » russes. « Via les représentants de l’Otan, on nous adresse des ultimatums : « Vous, la Russie, faites tout ce sur quoi on s’est mis d’accord, notamment New Start, et nous, nous ferons ce que bon nous semble » », a accusé le maître du Kremlin.
Vladimir Poutine a ainsi suggéré que l’Otan rejoigne New Start pour rendre ce traité équitable, « car, au sein de l’Otan, les États-Unis ne sont pas la seule puissance nucléaire ». « La France et la Grande-Bretagne ont aussi des arsenaux nucléaires, elles les perfectionnent, les modernisent et ils sont dirigés contre nous », a-t-il encore dit.
La Russie continuera toutefois de respecter la limitation imposée à son arsenal nucléaire par le traité New Start, selon le ministère russe des Affaires étrangères. Le président russe a aussi appelé les autorités russes à se tenir « prêtes à des essais d’armes nucléaires » si Washington en effectuait en premier.