L’homme d’affaires colombien Alvaro Pulido, associé de l’émissaire vénézuélien Alex Saab, a été arrêté au Venezuela. Cela intervient alors que le gouvernement de Nicolas Maduro a lancé une vaste opération anti-corruption mi-mars. Au total, au moins 58 personnes, parfois haut placées, ont été arrêtées.
Alvaro Pulido, homme d’affaires colombien, était le principal associé d’Alex Saab, présenté par le gouvernement de Nicolas Maduro comme un émissaire de l’État vénézuélien, et emprisonné depuis octobre 2021 aux États-Unis. Alex Saab et Alvaro Pulido Vargas – qui se faisait aussi appeler German Enrique Rubio Salas – ont été mis en examen pour corruption par un tribunal de Floride.
La justice américaine les accuse, avec leurs complices, d’avoir versé des pots-de-vin et des commissions secrètes à des intermédiaires au Venezuela pour obtenir de juteux contrats publics.
Les deux hommes sont soupçonnés, notamment, d’avoir détourné de l’argent du programme d’aide alimentaire du gouvernement vénézuélien, destiné aux habitants les plus pauvres. Ce programme, appelé CLAP (Comités locaux d’approvisionnement et de production) a été lancé en 2016, alors que le pays s’enfonçait dans une hyperinflation sans précédent et dans une profonde crise économique, sociale et politique. En février 2020, d’après le Programme alimentaire mondial, un tiers de la population ne mangeait pas à sa faim.
Les deux hommes sont aussi soupçonnés d’avoir détourné près d’1,5 milliard de dollars de la compagnie pétrolière publique PDVSA, d’après des révélations ce mois-ci du site Armando.info, qui fait partie du Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ).
Que sait-on de son arrestation ?
Une source judiciaire vénézuélienne a assuré mercredi à l’Agence France-Presse (AFP) qu’Alvaro Pulido avait bien été arrêté, tout comme l’annonçait mardi la chaîne CNN en espagnol. Les autorités vénézuéliennes n’ont cependant pas confirmé officiellement l’information pour l’instant.
Jusqu’ici, la justice américaine promettait dix millions de dollars de récompense pour toute information permettant l’arrestation de cet homme d’affaires lié « au régime corrompu de Maduro ».
Le procureur général du Venezuela, Tarek William Saab, avait déclaré fin mars auprès de la radio colombienne W Radio que la maison d’Alvaro Pulido à Caracas avait bien été perquisitionnée.
Quelle est l’ampleur de l’opération anti-corruption en cours au Venezuela ?
Depuis la mi-mars, au moins 58 personnes ont été arrêtées et 18 autres font l’objet de mandats d’arrêt, dans le cadre d’une vaste opération anti-corruption, d’après les chiffres donnés par le procureur général. Parmi les personnes arrêtées se trouvent de hauts responsables de la compagnie pétrolière publique PDVSA, des hauts fonctionnaires, des dirigeants d’une entreprise minière publique, ou encore des magistrats.
La liste complète des personnes arrêtées et soupçonnées de faits de corruption n’a pas été rendue publique.
Les autorités vénézuéliennes n’ont pas non plus précisé pour le moment le montant des sommes qui auraient été détournées. Le site Armando.info assure avoir consulté des documents faisant état de plus de treize milliards de dollars de factures impayées pour des livraisons de pétrole effectuées par PDVSA entre 2019 et 2022 à des dizaines d’entreprises différentes.
S’agit-il d’une purge interne au régime ?
D’un certain point de vue, « on peut affirmer qu’il s’agit d’une purge » entre différentes factions du chavisme, répond Mariano de Alba, chercheur senior pour l’International Crisis Group. Cependant, « cette affaire révèle surtout au grand jour les niveaux de corruption très élevés au sein du gouvernement », souligne-t-il.
Cela alors que les enseignants manifestent depuis plusieurs mois pour demander de meilleurs salaires, face à une inflation parmi les plus élevées au monde – 310% en 2022, selon le FMI.
« Le fait qu’autant d’argent ait été perdu en raison de la corruption alors qu’il aurait pu servir à augmenter les salaires – aujourd’hui extrêmement bas – des fonctionnaires place le chavisme en très mauvaise posture vis-à-vis de l’opinion publique, alors que le pays se prépare à une nouvelle élection présidentielle en 2024 », conclut le chercheur, joint par RFI.