Confrontés à une inflation record à plus de 108%, les Argentins pourront bientôt utiliser un nouveau billet de 2 000 pesos. Plus grosse coupure en circulation, elle aura une valeur de 8 dollars au taux officiel, mais de la moitié au taux informel. Et avant même son arrivée dans les portefeuilles, ce nouveau billet est déjà boudé par les épargnants, qui ont abandonné le peso au profit du dollar il y a bien longtemps.
Juan recompte une dernière fois les 49 billets de 1 000 pesos étalés devant lui. « Je viens d’appeler un changeur pour acheter des dollars », dit-il. En échange de cette liasse, il recevra un billet de 100 dollars. « J’essaye d’acheter des dollars tous les mois, c’est comme ça que j’épargne », explique Juan.
Dans un pays où l’inflation annuelle dépasse les 108%, épargner en dollar, c’est éviter de voir ses économies fondre de moitié en l’espace d’un an. Car Juan ne garde pas son argent sur un compte bancaire. « Jamais de la vie », promet-il. Comme de nombreux Argentins, il thésaurise en liquide. Il ne cache pas son pécule sous son matelas, mais presque. Et c’est là que les dollars présentent un autre avantage de taille, explique Matias, qui épargne lui aussi en billets verts :
« C’est une question de volume, ça fait moins de billets à stocker. Nous, les Argentins, nous avons eu de très mauvaises expériences avec les banques et nous ne leur faisons pas confiance. »
Matias fait notamment référence à la ruée bancaire de la crise de 2001, qui a obligé le gouvernement d’alors à limiter les retraits avant qu’une dévaluation ne fasse fondre les économies de millions d’Argentins. Même avec le nouveau billet de 2 000 pesos, épargner en monnaie est inenvisageable pour Matias : « Impossible. Le dollar est le seul moyen de préserver nos économies en nous sentant en sécurité et sans nous embarrasser de trop de papiers ou de billets. »