À 6 000 kilomètres du Niger, Zeinabou suit heure par heure la situation dans son pays d’origine. Elle n’a pas hésité à braver la pluie parisienne pour manifester et dire non au coup d’État au Niger. « Je suis là pour défendre mon président qui a été élu par le peuple. Le Niger, ce n’est pas pour les militaires, c’est pour nous ! On est là aujourd’hui pour la paix », a-t-elle confié au micro de Baptiste Coulon.
Idem pour Boubacar. Sur son t-shirt est inscrit le slogan : « Stop à la tentative de coup d’État, Oui pour le retour à l’ordre constitutionnel. » Lui n’est pas rassuré : « Au rythme où ça va, j’ai peur que les militaires ne fassent pas marche arrière. »
Ses parents sont au Niger, où les prix augmentent, où retirer de l’argent est plus difficile, et où la crainte d’un conflit pèse sur le quotidien. « Ils ont peur. Peur pour le pays, qu’il y ait plusieurs camps qui s’affrontent. Mes parents sont des démocrates, ils ont peur pour la démocratie », confesse Boubacar, qui partage cette crainte : « Je pense à moi, à mes enfants. À tout moment, ces militaires, pour n’importe quelle raison, peuvent intervenir. On n’a pas besoin de ça. L’Afrique doit avancer, le Niger doit avancer. S’il y a à chaque fois des coups d’État qui perturbent les démocraties, on n’avancera pas. »
En cas de conflit, chacun fait ici le pari que la communauté nigérienne sera solidaire pour surmonter l’épreuve. Présent à Paris lors de la manifestation, le Premier ministre nigérien, Ouhoumoudou Mahamadou, a confié qu’il « espère toujours que la négociation l’emportera » avant la fin de l’ultimatum de la Cédéao dimanche « et qu’il n’y aura pas nécessairement d’intervention militaire ».
Ouhoumoudou Mahamadou, Premier ministre du Niger, s’exprime lors d’une manifestation à Paris
« Sauvons le peuple nigérien par la voie de la diplomatie »
En Côte d’Ivoire, la communauté nigérienne suit également de près la situation au Niger et les négociations en cours au plan régional. Au moins 750 000 Nigériens vivent en Côte d’Ivoire, dont 100 000 à Abidjan. Et les divisions qui touchent actuellement la population du Niger se retrouvent dans la capitale ivoirienne, relate François Hume-Ferkatadji, qui a rencontré des membres de la communauté dans le quartier Haoussa Bougou de la commune de Koumassi, à Abidjan.
La prière à peine terminée, des Nigériens originaires de Tahoua s’emparent de leur téléphone pour faire défiler les dernières nouvelles de la situation de leur pays. À Koumassi, nombreux sont les soutiens de Mohamed Bazoum.
« Le Niger est un État de droit. On est en démocratie. Le président Bazoum a gagné les élections en 2021. Je ne vois pas pourquoi les putschistes viennent avec leurs armes pour menacer la démocratie au Niger ! Tous les Nigériens sont contre et soutiennent la Cédéao pour intervenir et ramener l’ordre constitutionnel », explique l’un d’eux. « Nous ne les considérons pas comme des généraux ! Nous les considérons comme des terroristes ! Nous ne voulons pas de terroristes au Niger ! », s’exclame un autre.
Selon les partisans de l’intervention militaire, la Cédéao doit agir et « joue sa crédibilité ». Aboubakar Idy, lui, veut encore croire à la voie diplomatique : « Le Niger n’a pas besoin de la guerre. S’il vous plaît, la Cédéao, sauvons le peuple nigérien par la voie de la diplomatie. »
Et lorsqu’un homme d’âge mûr vient clamer son soutien aux militaires au pouvoir, le ton monte dans cette petite allée bordée d’artisans.
Des soutiens de Mohamed Bazoum et membres du PNDS, l’ex-parti au pouvoir, souhaitaient organiser un rassemblement dimanche dans la commune d’Adjamé. Ils indiquent avoir essuyé un refus des autorités ivoiriennes.