
Accusé par la gauche d’avoir menti sur sa connaissance des violences et agressions sexuelles dans le collège-lycée de Bétharram, dans le sud-ouest de la France -, François Bayrou « récuse » tout mensonge, parlant de « polémiques artificielles ». L’institution fondée en 1837, de sinistre réputation dans la région, a été fréquentée par plusieurs de ses enfants et son épouse y a enseigné, un temps, le catéchisme. Des très nombreux élèves avaient accusé des responsables de l’établissement de violences, notamment sexuelles, sur mineurs.
L’entourage du Premier ministre a confirmé à l’AFP qu’il se rendra bien le 14 mai devant la commission sur les violences et les contrôles de l’État dans les établissements scolaires.
Un ancien gendarme et un ex-juge, entendus ce jeudi 10 avril devant la commission d’enquête parlementaire née du scandale Bétharram, ont maintenu des propos qui vont à l’encontre des dénégations de François Bayrou.
François Bayrou sous pression
Alain Hontangs et Christian Mirande, qui furent chargés d’enquêter sur la première plainte pour viol ayant visé un religieux de l’établissement scolaire catholique, s’étaient déjà exprimés dans la presse. Mais cette fois-ci, ils l’ont fait cette fois sous serment. Le premier, âgé de 71 ans, officiait à la section de recherches de Pau – la grande ville voisine, dont François Bayrou est le maire depuis depuis 2014. Il s’est rendu le 26 mai 1998 au Palais de justice local pour y présenter le père Carricart au juge Mirande, après une mise en cause par un ancien élève.
Ce jour-là, le juge Mirande « m’attendait devant la porte de son bureau » et il « m’a dit : “La présentation est retardée, le procureur général demande à voir le dossier, il y a eu une intervention de M. Bayrou” », a relaté Alain Hontangs aux deux corapporteurs de la commission, les députés Violette Spillebout (parti Renaissance) et Paul Vannier (La France insoumise).
Il avait déjà tenu ces propos à la mi-février lors d’un reportage à la télévision française. Deux jours plus tard, à l’Assemblée nationale, le Premier ministre avait affirmé n’être « jamais » intervenu, « ni de près, ni de loin », dans ce dossier, niant tout contact, « avec qui que ce soit », à son propos.
Le juge Mirande a répété aussi que François Bayrou était venu le voir chez lui durant l’affaire de viol, en 1998, pour évoquer cette dernière, ce que l’intéressé a d’abord nié, avant d’évoquer une rencontre fortuite. Autant de propos qui « contredisent point par point » les déclarations du chef de gouvernement, a conclu le député Vannier devant la presse après les auditions.
Élisabeth Borne annonce une enquête plus poussée de l’Éducation nationale
Critiquée pour ne pas s’être penchée sur Bétharram depuis trois décennies, l’Éducation nationale s’est décidée à programmer en mars une inspection académique qui confronte la direction actuelle à des « manquements », selon son rapport par ailleurs dévoilé jeudi. Dans son viseur notamment, le cas de deux enseignants accusés de « remarques blessantes et humiliantes et de moqueries », a précisé ce jeudi l’actuelle ministre de l’Éducation Élisabeth Borne.
La ministre a mandaté une enquête plus poussée de sa haute administration. « Des témoignages d’élèves mettent en cause les agissements de deux enseignants » qu’on « ne peut pas accepter », et « d’autres éléments » ont été « relevés lors du contrôle effectué par le rectorat » dans l’établissement au cœur d’un scandale de violences commises sur des enfants, explique la ministre dans une interview au journal La Croix. « Le contrôle portait sur la situation actuelle de l’établissement et non sur les faits antérieurs », à savoir les violences sexuelles et physiques qui ont eu lieu dans l’établissement pendant des décennies, a précisé la ministre.
« À la suite de ce rapport, je vais diligenter une enquête administrative de l’inspection générale » poursuit Mme Borne, soulignant que le rapport de l’équipe du contrôle mené en mars, en réaction au scandale à Bétharram, est assorti « d’une mise en demeure avec une obligation de mise en conformité à court terme » sur des points problématiques. « Elle doit être extrêmement rapide », a intimé Élisabeth Borne, que la commission d’enquête a également annoncé vouloir rencontrer, comme d’autres anciens ministres de l’Éducation nationale.