Avec cinq représentants au Qatar, le foot africain va-t-il enfin faire sauter le plafond de verre des demi-finales ? Le Sénégal, même sans Sadio Mané, et le Maroc ont peut-être des joueurs pour l’exploit, tandis que trop d’incertitudes entourent le réel potentiel du Ghana, du Cameroun et de la Tunisie.
L’Afrique a très tôt connu la Coupe du monde avec la première représentante du continent, l’Égypte, qualifiée au deuxième Mondial de l’histoire (1934). Depuis, douze autres pays africains se sont invités à la plus prestigieuse compétition de football mondial sans parvenir à atteindre le dernier carré. Et seuls trois pays, le Cameroun (1990), le Sénégal (2002), et le Ghana (2010) ont pu se hisser en quarts de finale.
Le Qatar marquera-t-il la fin de la traversée du désert du foot africain dont aucun représentant n’avait franchi le premier tour lors de la dernière Coupe du monde en Russie ? Tour d’horizon des forces africaines.
Sénégal : la vie sans Sadio Mané
Avant la blessure de son leader Sadio Mané, deuxième du dernier Ballon d’Or, le Sénégal apparaissait, pour sa troisième participation, comme la meilleure chance africaine d’aller le plus loin possible. Pour autant, les Lions, champions d’Afrique en titre, possèdent un groupe qui peut rêver d’exploit même sans leur numéro 10. « On a un objectif en tête. Je ne vais pas vous le dire, mais c’est ambitieux, très ambitieux, a confié le milieu de terrain sénégalais, Pape Guèye à la veille du coup d’envoi du Mondial. On a des top joueurs, qui sont dans des grands clubs. Donc pourquoi ne pas rêver comme la France, l’Espagne ? ». Avec le capitaine Kalidou Koulibaly, le gardien Édouard Mendy, et le milieu Gana Gueye, le Sénégal possède assez d’expérience pour sortir sans dommage de la poule A qu’il partage avec le pays hôte, le Qatar, l’Équateur et les Pays-Bas. Le premier match face aux Hollandais donnera des indications sur le potentiel des Lions sans Mané, mais avec des armes offensives incarnées par Ismaïla Sarr ou Bamba Dieng. Après avoir fait sauter le plafond de verre de la CAN avec une première victoire historique, le Sénégal croit plus que jamais en son étoile.
Maroc : Du talent, mais du lourd en face
Le Maroc va disputer sa sixième Coupe du monde, emmené par une génération talentueuse, mais qui peine à confirmer les espoirs placés en lui depuis quelques années. Les Lions de l’Atlas, dirigés désormais par Walid Regragui après le limogeage de Vahid Halilhodzic, vont devoir, cette fois, montrer toute l’étendue de leur talent pour espérer sortir du groupe de la mort qu’ils partagent avec la Croatie (vice-championne du monde), la Belgique (2e au classement Fifa), et l’inconnu canadien emmené par l’attaquant Jonathan David. Les Marocains peuvent compter sur leurs leaders techniques comme Achraf Hakimi ou Hakim Ziyech, auteur d’un but splendide en match amical contre la Géorgie jeudi dernier. Éliminés dès le premier tour en 2018, sans être ridicules, mais plombés par l’inexpérience face au Portugal, l’Espagne et l’Iran, les Lions de l’Atlas savent à quoi s’attendre pour passer en huitièmes de finale et rêver plus grand.
Ghana : la belle surprise ?
Ceux qui sont restés sur l’image du Ghana, humilié et sorti au premier tour de la CAN 2022, risquent de ne pas reconnaître les Black Stars de cette Coupe du monde. D’abord, l’équipe d’Otto Addo s’est vite remise à l’endroit en éliminant le Nigeria en barrages de la Coupe du monde. Mais surtout, elle s’est offerte du sang neuf avec cinq binationaux, dont l’attaquant de l’Athletic Bilbao Inaki Williams, qui ont rejoint le groupe pour le Mondial. Ce renfort de qualité redessine un Ghana new-look, plus ambitieux et toujours porté par l’infatigable Thomas Partey et les frères Ayew, Jordan et André. Ce dernier, désormais recordman des sélections (110), reste le seul joueur présent à avoir vécu le Mondial 2010 où le Ghana avait frôlé la première demi-finale d’une équipe africaine dans un Mondial. Asamoah Gyan avait manqué dans les dernières minutes le penalty consécutif à la fameuse main de Luis Suarez. Justement, le Ghana retrouvera l’Uruguay dans sa poule qu’il partage aussi avec la Corée du Sud et le Portugal.
Tunisie : l’énigme des Aigles de Carthage
Dans une poule composée de la France, du Danemark et de l’Australie, la Tunisie devra être à un niveau jamais atteint ces dernières années pour espérer franchir le premier tour. Les Aigles de Carthage qui n’ont jamais réussi à se qualifier au second tour en cinq participations au Mondial, n’ont pas, pour l’instant, donné des gages d’un futur exploit dans cette compétition. Quarts de finaliste de la dernière CAN avec un style assez défensif, prôné par le technicien de Jalel Kadri, les Aigles de Carthage ont très souvent montré leurs limites offensives ces derniers mois, même si les talentueux Youssef Msakni et Wahbi Khazri sont encore la partie. Le premier match contre le Danemark, demi-finaliste du dernier Euro, renseignera sur les capacités de cette équipe tunisienne à enfin franchir le premier tour d’un Mondial.
Cameroun : éloigner d’abord les mauvaises ondes
Une « finale Cameroun-Maroc », c’est le doux rêve de l’ancien attaquant des Lions indomptables, Samuel Eto’o, aujourd’hui président de la Fédération camerounaise de football. Mais son équipe devra garder les pieds sur terre pour sortir d’un groupe composé de la Suisse, de la Serbie, et du grand favori de la compétition, le Brésil. Géant d’Afrique (5 CAN remportées), recordman africain des participations au Mondial (8), le Cameroun a l’expérience, le talent pour créer l’exploit. Mais avec les Lions indomptables, les problèmes, c’est souvent en dehors du terrain. Si l’épineuse question des primes n’est pas venue, pour l’instant, perturber la sélection, le débat sans fin sur l’absence de la liste du défenseur historique, Michael Ngadeu, a animé la préparation de l’équipe, déjà en proie avec la polémique sur les maillots. Pour autant, à l’image de leurs anciens, quart de finalistes en 1990, ces Lions emmenés par une attaque séduisante (Aboubakar, Choupo-Moting, Toko Ekambi), peuvent nourrir le rêve secret de se qualifier et de voir venir. À condition d’avoir déjà réglé la question avant leur troisième match de poule contre le Brésil…