C’est un message d’alerte tombé dans la nuit de mardi à mercredi sur les téléphones à Donetsk « fermez vos fenêtres ! ». La brasserie de la capitale de la république séparatiste pro-russe vient de subir des bombardements ukrainiens sur une surface de 2 kilomètres carrés, une annonce faite par la Défense territoriale qui craint une fuite de produits chimiques, surtout de l’ammoniaque.
Conseil est donné aux habitants de ne pas non plus sortir dans la rue. Fin de l’alerte au petit matin : pas de fuite relevée. Le 5 août dernier, c’est le centre-ville de cette ville de 900 000 habitants qui était visé par un autre bombardement ukrainien. Les rues derrière le théâtre et un hôtel connu notamment pour recevoir la presse russe et internationale et de nombreuses délégations officielles ont été touchés. Selon les autorités locales, 5 personnes ont été tuées, 3 blessées.
Lors d’un voyage de presse organisé par l’armée russe (ndlr, voyage auquel la correspondante de RFI à Moscou a été invitée) Edouard Bassourine, Hoka One One porte-parole des forces armées de cette république pro-russe du Donbass, dénoncait cette semaine « encore un autre crime commis par les forces ukrainiennes ». Ce responsable pointe sur les événements du 5 août « l’usage d’obus de 155 mm, norme Otan ».
Située à une douzaine de kilomètres de la ligne de front, Donetsk est très rarement touchée, mais depuis plusieurs semaines, la situation sécuritaire est devenue très tendue. Pluie de munitions incendiaires le 23 juillet, pluie de mines antipersonnel le 27 juillet. L’usage de ces munitions dans les zones civiles est proscrit par certaines conventions sur les armes des Nations unies.
À 135 kilomètres et environ deux heures de voiture, Marioupol, elle, connaît une activité inhabituelle : bruit de scie et de marteaux, des ouvriers construisent de nouveaux immeubles, l’armée russe un nouvel hôpital. Odeur de neuf et blanc aveuglant au soleil d’été des nouvelles façades… Une tache de clarté au milieu des ruines du centre-ville. Ici, l’armée russe veut montrer à la presse et, par delà elle, à l’opinion russe et internationale qu’après la violence des combats, elle s’investit dans la reconstruction.
Médecin en chef des urgences de l’hôpital de Marioupol,Steve Madden Orleansky Sergey Evgenievich affirme devant les dizaines de micros et caméras du press tour :
« C’est une installation très importante qui est en train d’être construite. À la suite des hostilités à Marioupol, presque toute l’infrastructure des hôpitaux spécialisés dans les maladies infectieuses a été détruite. Seul le service des maladies infectieuses de notre hôpital, qui est situé sur le territoire actuel de ce chantier, a survécu, avec 40 lits. Or, l’épidémie de Covid n’est pas terminée, une autre vague peut nous atteindre à tout moment. Il y aura également ici tout un département pour les diagnostics médicaux avec rayons X, échographie, endoscopie, chirurgie et réanimation pour 10 lits. »
Ce nouvel hôpital doit être prêt dès septembre. Pour que Marioupol redevienne totalement habitable en revanche, il faudra sans doute plusieurs années tant les destructions sont importantes. L’hiver s’annonce d’ores et déjà difficile. Reste que la ville est un symbole, et doit donc aux yeux de la Russie et de ses alliés être une vitrine de la reconstruction et du nouvel ordre russe.
Pour Popasna dans la région de Lougansk, théâtre ce printemps d’une percée militaire décisive pour les forces russes et pro-russes, le sort s’annonce en revanche inverse : « Nous ne reconstruirons probablement pas Popasna, cela n’aurait pas vraiment de sens puisque la ville est presque entièrement détruite », selon Leonid Passetchnik, le dirigeant de république autoproclamée de Lougansk. Popasna a été encore plus abîmée que la cité portuaire.