Aucun président français ne s’était rendu au Rajasthan jusqu’à présent. C’est certainement l’une des raisons qui ont contribué à choisir Jaipur pour arriver dans le pays. Pour Emmanuel Macron, commencer par la capitale du plus grand État d’Inde est une manière de s’immerger dans la culture indienne et la promesse d’images inédites, observe notre envoyée spéciale, Valérie Gas. Côté indien aussi, on vante cette étape à Jaipur où le Premier ministre Narendra Modi va accueillir Emmanuel Macron dans un observatoire astronomique afin de célébrer la coopération spatiale entre les deux pays, en présence de Thomas Pesquet, l’astronaute français qui voudrait bien aller sur la Lune.
Mais le point d’orgue de cette visite sera la parade militaire du Republic Day, vendredi à New Delhi. Comme en miroir du dernier défilé du 14-Juillet sur les Champs-Élysées, ouvert par 240 militaires indiens, un contingent français s’illustrera dans la grande parade militaire marquant le 75e anniversaire de la Constitution indienne. Le président Macron sera quant à lui l’hôte d’honneur dans la tribune officielle, tout comme Narendra Modi l’avait été place de la Concorde.
Un poids-lourd incontournable
Cette visite de 36 heures sera menée au pas de charge. Emmanuel Macron va enchaîner cérémonies, visites culturelles, mais aussi entretiens politiques. À la fois première puissance démographique du monde (1,43 milliard d’habitants), géant économique et puissance nucléaire, l’Inde est un poids-lourd incontournable et de plus en plus courtisé. Elle est en première ligne face à la Chine, rivale numéro un des États-Unis, avec laquelle elle entretient aussi des relations compliquées. Adepte du « multi-alignement », New Delhi entretient en revanche de bonnes relations avec la Russie, refusant de la sanctionner pour son invasion de l’Ukraine et allant même jusqu’à lui acheter le pétrole que les Européens boycottent.
La France, sous la houlette d’Emmanuel Macron, entend de son côté être un acteur de la zone Asie-Pacifique et se veut une puissance d’équilibre, passerelle entre le Nord et le Sud. Le chef de l’État s’est d’ailleurs déjà rendu deux fois en Inde, en 2018 et pour le sommet du G20 en septembre 2023.
Les deux dirigeants vont avoir des discussions sur l’Ukraine, le Moyen-Orient et la Chine ainsi que sur la coopération bilatérale en matière de défense, précise-t-on de source diplomatique indienne. Les deux puissances nucléaires cultivent de longue date des liens de défense, illustrés par l’intention de l’Inde d’acquérir 26 Rafale supplémentaires, outre les 36 déjà commandés. Les négociations se poursuivent sur la vente de ces 26 avions de combat destinés à la Marine, tout comme sur celle de trois sous-marins Scorpène. Aucune annonce ne devrait donc intervenir durant la visite.
Un accord-cadre en vue pour six réacteurs EPR
Cette visite sera aussi l’occasion d’ouvrir de nouvelles opportunités commerciales, alors que le commerce bilatéral a atteint les 15 milliards d’euros en 2022. Un volume encore modeste comparé, aux échanges France-Chine, estimé à plus de 100 milliards. Et les investissements français dans le pays ont augmenté, pour atteindre 25 milliards.
Dix-neuvième client de l’Inde, Paris est seulement son 29e fournisseur. Les exportations françaises sont essentiellement du matériel aéronautique et militaire. Car le pays reste protectionniste dans de nombreux secteurs, comme l’agroalimentaire, l’automobile et la pharmacie. La France ambitionne néanmoins de vendre six réacteurs EPR à l’Inde pour la centrale de Jaitapur, dans l’État du Maharashtra, un projet dans les tuyaux depuis quinze ans. Un accord-cadre pourrait être conclu à l’occasion de la visite, selon une source indienne.
Sera-t-il question des droits de l’homme ? Alors que le Premier ministre indien est accusé de dérives autoritaires et de répression des minorités religieuses, l’Élysée répond qu’il n’y a pas de « sujet tabou, mais que le but est de les évoquer dans le respect et avec pour objectif de parvenir à des résultats concrets ».