Les élèves auront-ils tous un professeur en cette rentrée scolaire ? Rien n’est moins sûr, quand on sait que, cette année encore, les concours n’ont pas fait le plein. Et malgré le recours aux contractuels, 2 000 postes d’enseignants ne sont toujours pas pourvus. La situation est particulièrement tendue dans les académies de Créteil, de Versailles, de Guyane et de Mayotte.
Se posera donc la question des remplacements. Le ministre Gabriel Attal a fait le calcul : 15 millions d’heures sont perdues chaque année et cela pèse sur le niveau des élèves. Cette situation n’est pas récente et s’explique par le manque d’attractivité du métier.
Le fameux pacte enseignant, qui est un des sujets brûlants de la rentrée, prévoit pour les professeurs qui le souhaitent une rémunération en échange d’heures de travail supplémentaires. Pour les syndicats enseignants, il s’agit « de travailler plus, de s’épuiser plus pour gagner plus » : une nuance de taille à la promesse présidentielle d’augmenter immédiatement de 10% tous les enseignants sans contrepartie.
Dans les faits, la hausse des salaires des enseignants sera seulement de 5,5% au mois de septembre, soit moins que le rythme de l’inflation.
Des lycéennes musulmanes partagées sur l’interdiction de l’abaya
Mais le gouvernement avait voulu imposer la question de la laïcité comme thème central, selon Gabriel Attal. Dès lundi 4 septembre, la disposition, annoncée par le ministre de l’Éducation nationale concernant l’interdiction du port de l’abaya à l’école, sera appliquée et les élèves se présentant avec ce vêtement ne pourront pas entrer en classe, mais seront accueillis par les établissements scolaires. Ceux-ci devront alors leur expliquer le sens de cette interdiction.
Les lycéens, premiers concernés, sont partagés à ce sujet. Exemple avec trois lycéennes musulmanes dont deux sœurs jumelles. Elles ont les mêmes prunelles noires, la même bouche bien dessinée, elles sont jumelles, musulmanes et ont 14 ans.
La première, Maroua, porte le voile. La seconde, Safa, laisse ondoyer sa chevelure brune. Mais elles disent d’une même voix que, contrairement au voile, l’abaya n’est pas un vêtement religieux : « Il y a plusieurs styles, il y a plusieurs coloris, cela crée une certaine mode et je pense que c’est aussi pour ça que plusieurs filles de notre génération se permettent de mettre une abaya. »
En jogging et basket, Nina, troisième élève, s’est convertie à la religion musulmane. « On ne va pas se mentir, la plupart des personnes qui le mettent sont des personnes originaires du Moyen-Orient ou de l’Afrique subsaharienne, confie-t-elle. Donc oui, pour moi, c’est culturel et identitaire. Mais après, c’est vrai que maintenant, les gens n’arrivent pas à faire la différence entre religion et culture, donc c’est un peu compliqué. »
En cette rentrée, l’abaya sera interdite au lycée, et les deux sœurs jumelles, Maroua et Safa, ne sont pas d’accord sur ce point : « Je pense que c’est une très bonne mesure, parce qu’après, sur les réseaux sociaux, notamment TikTok, on voit beaucoup de filles qui essaient de faire une petite révolution entre elles pour mettre l’abaya le jour de la rentrée et je trouve que cela est un peu fâcheux. On est en France, un pays laïque, et on ne peut pas se permettre de ternir tête au règlement », opine une des deux.
Sa sœur, elle, enchaîne : « Je ne suis pas du tout d’accord avec ce que ma sœur vient de dire, je ne suis pas d’accord avec une mesure qui pourrait interdire quelqu’un d’étudier à cause d’un simple vêtement. »
À ce sujet, les lycéennes insistent sur le fait que les responsables scolaires doivent éviter l’agressivité et favoriser le dialogue, pour appliquer les mesures avec bienveillance.
Certaines écoles font leur rentrée malgré des sérieux dommages pendant les émeutes
En France, cette année, cinq écoles ne pourront pas accueillir les professeurs et les élèves comme prévu, car ces établissements ont été brûlés lors des émeutes de juillet et les travaux de restauration sont toujours en cours.
L’un de ces établissements se trouve à Petit-Quevilly, près de Rouen, dans le nord-ouest. Dans cette ville de 20 000 habitants, l’école maternelle Robert-Desnos est partie en fumée. Alors, élèves et professeurs feront leur rentrée dans un autre site. Toute une organisation était à revoir pour les parents d’élèves et les équipes pédagogiques.
L’école Robert Desnos était idéalement placée, juste au pied de l’immeuble de Christelle. Mais pour cette rentrée, c’est à l’école maternelle Jean-Baptiste Clément qu’ira Imène, sa fille de cinq ans : « Là ça va me faire encore plus loin, c’est douze minutes aller et douze minutes retour, ça me fait quand même un bon trajet. » « Ne t’inquiète pas maman », lui dit Imène.
Avec ce changement d’école, c’est toute une organisation à revoir. Car impossible pour Christelle d’être à l’heure à l’école maternelle et à l’école primaire où sont scolarisés ses autres enfants. « Je vais être obligée de faire appel à une amie pour emmener ma grande fille de 8 ans à l’école primaire pendant que je dois conduire ma petite à l’école Jean-Baptiste Clément qui se trouve à un kilomètre. »
Avant cette rentrée, Imène se pose une question : « Je ne sais pas comment elle est, la nouvelle école où je vais aller la prochaine fois. » « Dans cette école-là, elle avait tous ses repères et j’ai peur qu’elle les perde dans la nouvelle école », explique sa mère.
Séverine Muller est la directrice de l’école Jean-Baptiste Clément. Avec ses équipes, elle a travaillé tout l’été pour accueillir au mieux les cinq classes de l’école Desnos, afin de faire en sorte que cette rentrée un peu particulière ressemble à toutes autres : « Elle est un peu extraordinaire, cette rentrée. Nous avions quatre salles de classe qui n’étaient pas occupées. Et nous avions une très grande salle d’activité périscolaire qu’il a été possible de séparer et recréer une classe supplémentaire, pour que tout le monde se sente bien. »