« Le parquet spécial contre l’impunité, en coordination avec la PNC (police nationale civile), procède à une perquisition au siège du parti politique Semilla », situé dans le centre de la capitale Guatemala, a écrit cet organe sur Twitter, dans ce qui constitue un nouvel épisode d’une campagne présidentielle marquée par des actes judiciaires.
La perquisition a commencé quelques heures après le dépôt d’un recours du Tribunal suprême électoral (TSE) devant la Cour constitutionnelle visant à empêcher le bureau du procureur général d’entraver le second tour qui doit opposer Bernardo Arévalo à Sandra Torres, également de sensibilité sociale-démocrate. Celui des deux qui remportera le scrutin succédera le 14 janvier au président Alejandro Giammattei, mettant fin à douze années de gouvernement de droite. Mais encore faut-il que le scrutin se tienne.
« Cet acte fait partie de la persécution politique de la minorité corrompue qui sait qu’elle est en train de perdre le pouvoir jour après jour », a déclaré après la perquisition Bernardo Arévalo, fils de l’ancien président Juan José Arevalo (1945-1951). Des dizaines de partisans de Bernardo Arévalo se sont rassemblés devant le siège du parti au moment de la perquisition. « Curruchiche n’est pas un procureur, c’est un criminel », ont scandé les manifestants à propos du fonctionnaire inscrit par les États-Unis en 2022 sur une liste de ressortissants d’Amérique centrale liés à des « actes de corruption et antidémocratiques ».
Action du procureur dès le lendemain du premier tour
Le parquet a expliqué que la perquisition avait été menée « pour obtenir des indices qui solidifient l’enquête » contre le parti Semilla pour de présumées irrégularités lors de sa création en 2017. Le procureur général Rafael Curruchiche a commencé à agir contre Semilla après le premier tour de la présidentielle, le 25 juin, à l’issue duquel Bernardo Arévalo a créé la surprise en devançant Mme Torres. Le juge Fredy Orellana a suspendu la semaine dernière à sa demande l’enregistrement juridique du parti, arguant d’irrégularités présumées dans l’inscription de ses membres.
La Cour constitutionnelle a cependant suspendu le lendemain cette décision, critiquée tant au Guatemala qu’à l’étranger, vue comme une tentative d’écarter Bernardo Arévalo du second tour. Toujours sur ordre de Rafael Curruchiche, les bureaux du Tribunal suprême électoral ont été perquisitionnés à deux reprises en raison notamment de son refus de se conformer à l’ordre controversé du juge Orellana de disqualifier Semilla.
Il y a une semaine, il avait perquisitionné les bureaux du Registre des citoyens. Un mandat d’arrêt a en outre été délivré à l’encontre d’une dirigeante de Semilla. Bien que les candidats qui ont remporté le premier tour sont tous deux sociaux-démocrates, les actions du parquet et du juge Orellana se concentrent sur Bernardo Arévalo. Il est vraisemblablement considéré par des secteurs puissants dans le pays comme un danger pour leurs intérêts.
Le système politique actuel « a peur de perdre le pouvoir »
Le système politique actuel « a peur de perdre le pouvoir », souligne Manfredo Marroquin, de l’ONG Accion Ciudadana, la section locale de Transparency International. « Ils sont en mode panique et cherchent à tout prix le dernier recours entre leurs mains pour contrecarrer la victoire d’Arévalo ».
Dans son recours devant la Cour constitutionnelle, le Tribunal suprême électoral lui demande d’ordonner au ministère public, mais aussi à la police, l’armée, la Cour suprême et à d’autres institutions du pays de garantir le second tour. Il estime qu’il existe « une menace certaine, future et imminente que les autorités dénoncées violent l’État de droit démocratique en ne garantissant pas l’exercice des fonctions du Tribunal suprême électoral, des organes électoraux temporaires et des citoyens en général ».