Le premier groupe bancaire suisse UBS rachète son rival en difficulté, Credit Suisse. C’est ce qu’a annoncé ce dimanche 19 mars le président de la Confédération helvétique.
Le président Alain Berset a estimé que c’était le meilleur moyen de « rétablir la confiance ». Cette solution « n’est pas seulement décisive pour la Suisse (…) mais pour la stabilité de l’ensemble du système financier » mondial, a assuré M. Berset, lors d’un point de presse en présence des présidents des deux géants bancaires, Colm Kelleher pour UBS et Axel Lehmann pour Credit Suisse. La ministre des Finances, Karin Keller-Sutter, a déclaré lors de la conférence de presse que la faillite de Credit Suisse aurait pu provoquer « des dommages économiques irréparables ». « Pour cette raison, la Suisse doit assumer ses responsabilités au-delà de ses propres frontières. »
Au terme d’un week-end entier de négociations serrées entre les deux banques et les autorités suisses, un compromis a été trouvé. Il permet de sauver la finance suisse du désastre. Credit Suisse est l’une des grosses banques européennes et sa faillite aurait plongé le monde de la finance dans une crise inédite.
Une transaction à 3 milliards de francs suisses
La transaction s’élève à 3 milliards de francs suisses (3,02 milliards d’euros) payables en actions UBS, soit 76 centimes seulement pour une action Credit Suisse qui valait encore 1,86 franc suisse vendredi soir. Ce sauvetage se fait au détriment des actionnaires. Ils recevront désormais une action UBS pour 22 actions Credit suisse. Pour autant, c’est un soupir de soulagement que l’on entend désormais en Suisse. Fondée en 1856, Credit Suisse est la deuxième banque helvète. Elle emploie près de 50 000 personnes et gère pour 1500 milliards d’actifs dans le monde.
« Il fallait absolument résoudre le problème avant l’ouverture des marchés et donc la solution a dû être trouvée ce week-end. C’est une solution qui n’est pas très heureuse pour les actionnaires du Credit Suisse. Mais était la seule qui pouvait s’imposer de manière intelligente, qui je crois va rassurer les marchés financiers tout en continuant à susciter quand même quelques craintes, parce que la perte de prise par les actionnaires de Credit Suisse est vraiment très importante », a déclaré à RFI Bruno Colmant, professeur d’économie à l’Université libre de Belgique.
« UBS devient quasiment consubstantielle à l’État suisse. C’était déjà le cas maintenant, mais ce sera encore plus que demain. Ceci étant, c’était ça ou c’était l’effondrement bancaire. Donc, l’État va aider cette nouvelle banque par des garanties, mais l’État va devoir imposer aussi des pertes, par exemple aux porteurs d’obligations. Par la force des choses, on est devant une situation qui n’est pas optimale, mais qui devait absolument être solutionnée avant l’ouverture des marchés. Parce que si ça n’avait pas été le cas, je crois qu’il y aurait vraiment eu des inquiétudes bancaires extrêmement profondes », analyse l’économiste Bruno Colmant.
Garanties du gouvernement suisse
UBS va bénéficier d’une garantie de quelque 9 milliards de francs suisses du gouvernement qui sert d’assurance, si des problèmes devaient être découverts dans des portefeuilles très spécifiques de Credit Suisse. La Banque centrale accorde par ailleurs une ligne de liquidités allant jusqu’à 100 milliards de francs suisse à UBS et Credit Suisse.
UBS, qui a passé plusieurs années à se redresser après le choc de la crise financière de 2008 et un sauvetage massif de l’État, commence à récolter les fruits de ses efforts. Il a fallu énormément de pressions des autorités pour que la direction de la banque accepte d’endosser l’habit du sauveur. La Commission de la concurrence pourrait également sourciller selon la configuration du rachat.
Du Trésor américain à la Banque centrale européenne (BCE) en passant par Londres, l’annonce de ce rachat a été aussitôt saluée par plusieurs pays et banques centrales. Reste à savoir si cette gigantesque opération de sauvetage va calmer les marchés financiers. Depuis la faillite de la banque californienne SVB, les bourses du monde entier tremblent et les marchés font la chasse aux banques en difficultés. La question qui est sur toutes les lèvres, c’est de savoir qui sera désormais la prochaine cible.
Juste après ce sauvetage, les banques centrales des États-Unis, de Suisse et d’autres pays, ont d’ores et déjà annoncé une action coordonnée pour améliorer l’accès aux liquidités.