Méditerranée: 41 migrants disparus dans un nouveau naufrage au large de Lampedusa

C’est à nouveau la forte houle qui a surpris un navire de migrants et l’a fait couler dans le canal de Sicile. Ils étaient partis le matin, jeudi 3 août, de Sfax en Tunisie, sur une embarcation en métal. Alors qu’ils se dirigeaient vers les côtes de Lampedusa, à une centaine de kilomètres de là, une mer très agitée a renversé le bateau six heures seulement après leur départ, rapporte notre correspondante à Rome, Blandine Hugonnet.

À bord, des dizaines de candidats à l’exil, dont trois enfants. Ils sont 41 au moins, à avoir disparu en mer ce jour-là. C’est en tout cas ce que racontent les rescapés, cités dans un communiqué par les agences des Nations unies pour les réfugiés (HCR), l’enfance (Unicef) et les migrations (OIM). Ils sont seulement quatre à avoir échappé à la mort dans cette traversée. D’après leurs témoignages, ces exilés ont été sauvés de la noyade grâce à leurs gilets de sauvetage, ils n’étaient qu’un tiers à en avoir à bord, et grâce à une autre embarcation trouvée vide en mer sur laquelle ils seraient montés. Ils auraient dérivé pendant quatre jours avant d’être secourus mardi 8 août par un cargo maltais.

Augmentation importante du nombre d’arrivées en Italie

Récupérés par les gardes-côtes italiens, ces naufragés, trois hommes et une femme originaires de Côte d’Ivoire et de Guinée, ont posé le pied sur la terre ferme seulement ce mercredi 9 août dans la matinée. Arrivés à Lampedusa, ils ont été pris en charge par la Croix-Rouge dans le centre d’enregistrement de la petite île italienne.

Après trois autres naufrages en Méditerranée centrale ces derniers jours, c’est un énième drame aux portes de l’Europe qui s’ajoute au bilan de plus de 1 800 personnes qui ont déjà péri depuis janvier dans des naufrages en Méditerranée centrale, la route migratoire la plus meurtrière au monde, selon des chiffres compilés par les Nations unies.

Près de 94 000 migrants sont arrivés sur les côtes italiennes depuis le début de l’année, plus du double que sur la même période en 2022, selon les chiffres publiés par le ministère de l’Intérieur italien. Ce chiffre a notamment explosé en juillet dernier quand 23 000 migrants ont atteint l’Italie, selon le ministère italien de l’Intérieur.

De leur côté, les autorités tunisiennes disent avoir intercepté en méditerranée plus de 35 000 migrants durant les six premiers mois de l’année. 903 noyés ont été repêchés et 922 au moins ont disparu sur la même période, précise le Forum tunisien des droits économiques et sociaux.

Sfax se trouve à environ à 600 km de Lampedusa et est depuis début 2023 le principal point de départ des milliers de migrants. Tunis, qui a récemment signé un accord avec l’Union Européenne pour lutter contre la migration clandestine, continue depuis juillet à repousser quotidiennement les migrants de Sfax vers la zone frontalière avec la Libye.

En Italie, le naufrage suscite de nombreuses réactions

« Encore un massacre, encore une tragédie, encore des morts innocents qui fuient la guerre, les discriminations et la famine ». Ce sont les mots de la cheffe du parti démocrate, Elly Schlein, choquée après la mort des 41 migrants. Alors que la patronne du gouvernement d’extrême droite Giorgia Meloni a fait de la lutte contre les arrivées d’exilés une priorité et a soutenu un accord entre Bruxelles et Tunis pour contenir les départs, concentrés cette année depuis le pays de Kaïs Saïed accusé d’autoritarisme, l’opposition de gauche dénonce le « cynisme » de Rome.

Elles aussi révoltées par cet énième naufrage, les organisations humanitaires dénoncent l’absence de système européen de secours. Avec une « flotte coordonnée et structurée de recherche et secours en mer », ces drames « inacceptables » seraient « en grande partie évitables », estime Save the Children.

Au moment où le pouvoir conservateur italien prévoit en septembre un nouveau tour de vis contre l’immigration en Italie, les ONG, déjà visées par des restrictions, alertent sur ces tragédies presque quotidiennes ce mois-ci. Ce naufrage est une démonstration, selon elles, que les politiques « d’externalisation des frontières (…) rendent les voyages migratoires plus dangereux », dit Médecins sans frontières. D’une même voix, les agences de l’ONU sont aussi intervenues et ont appelé à renforcer les voies légales et sûres au sein de l’Union européenne pour éviter ces voyages, fatals, en Méditerranée.

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