Menace russe: le plan Défense de la Commission européenne

La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, le 4 mars 2025 à Bruxelles.
La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, le 4 mars 2025 à Bruxelles. © Virginia Mayo / AP

C’est dans un courrier adressé ce mardi 4 mars aux dirigeants européens que la présidente la Commission européenne abat ses cartes. Avec une ambition « réarmer l’Europe » dans le contexte de la guerre en Ukraine et de la brutale dégradation des relations entre Kiev et Washington. Dans cette situation l’Europe doit réagir rapidement, et c’est ce qu’a déclaré ce matin Ursula von der Leyen en présentant ses priorités.

« Nous sommes à l’ère du réarmement et l’Europe est prête à augmenter massivement ses dépenses de défense, à la fois pour soutenir l’Ukraine, mais aussi pour assumer sur le long terme notre propre sécurité européenne. Bien entendu, nous continuerons à travailler étroitement avec nos partenaires de l’Otan… L’heure de l’Europe a sonné, et nous prêts à relever le défi », a-t-elle souligné.

Pour y parvenir, la présidente de la Commission veut mobiliser jusqu’à 800 milliards d’euros. Avec comme ambition non seulement de réarmer l’Europe mais aussi de renforcer son industrie de défense pour s’affranchir de la dépendance aux Etats-Unis.

« Réarmer l’Europe »

Première piste ce programme « Réarmer l’Europe » : un nouvel emprunt commun à hauteur de 150 milliards d’euros, des fonds qui devraient aller en priorité aux domaines considérés comme les plus urgents : la défense anti-aérienne, les missiles, les drones et les systèmes anti-drones, ou encore les systèmes d’artillerie.

Autre proposition de la présidente de la Commission : l’UE pourrait autoriser ses États membres à sortir les dépenses d’armements du Pacte de stabilité et du fameux plafond des 3 % de PIB qui doit limiter les déficits publics. Les États européens pourront augmenter leurs dépenses de défense sans déclencher les foudres de l’Union européenne.

Ursula von der Leyen veut également rendre possible l’utilisation des fonds de cohésion pour doper la défense européenne. Des fonds qui sont censés être utilisés pour réduire les inégalités entre les pays européens. Dernières pistes avancées par la Commission : autoriser la Banque européenne d’investissements à financer des projets de défense, ce qu’elle n’a pas le droit de faire actuellement ; enfin mobiliser davantage le secteur privé pour le financement de la défense.

L’UE prise en étau

Ces propositions seront donc examinées dès jeudi 6 mars à Bruxelles par les dirigeants de l’Union européenne, dans le cadre d’un sommet convoqué dans l’urgence, pour faire face à la nouvelle donne géopolitique provoquée par Donald Trump. L’Europe doit dégager une ligne de conduite alors qu’elle se trouve prise en étau entre la menace russe d’un côté, et le « lâchage » de son allié américain de l’autre. Il sera question bien sûr de l’aide à l’Ukraine – l’Europe aura-t-elle des solutions pour suppléer l’aide américaine suspendue ?

Il sera question aussi de la Défense des pays européens eux-mêmes. Les propositions mises sur la table par la Commission auraient pris en temps normal des mois et peut-être même des années à être mises en œuvre, mais pourraient être adoptées très rapidement en raison de la brusque accélération de l’histoire à laquelle les pays européens assistent depuis plusieurs semaines. Des pays qui auraient été a priori hostiles à la plupart des idées avancées ce matin par la présidente de la Commission européenne – par atlantisme ou par orthodoxie budgétaire, pourraient ainsi accepter ce qu’ils auraient refusé auparavant.

En quoi consiste l’aide américaine à l’Ukraine ?

La fin de l’aide militaire de Washington est un coup rude pour l’Ukraine qui ne pourra pas combler ce vide auprès de ses partenaires européens.

L’aide la plus massive américaine est paradoxalement celle qui, ces trois dernières années, fut la moins visible : il s’agit du renseignement. Plus exactement la planification du ciblage dans la profondeur du dispositif militaire russe. Cette contribution fut capitale et considérable, bien sûr les Américains n’ont pas été les seuls à fournir du renseignement, mais la quantité fournie et la conception des opérations sera difficile à combler.

Le second appui décisif touche aux feux dans la profondeur et en particulier à l’artillerie roquette : les systèmes Himars d’une portée de plus de 100 kilomètres ont permis de rééquilibrer le rapport de force et à briser les offensives russes en offrant aux Ukrainiens la possibilité de détruire les concentrations d’hommes, de matériels et les centres de commandement russes. L’armée américaine a largement contribué à massifier l’artillerie ukrainienne.

Troisième soutien décisif : la défense sol-air. Avec le puissant apport de l’emblématique système Patriot dont les missiles sont parvenus à écarter la menace des munitions russes les plus véloces à l’instar des Kinjals et autres missiles Kalibr.

Les Américains ont également fourni un grand nombre de véhicules blindés de type Bradley ou Stryker qui permettent aux forces ukrainiennes d’évoluer sous blindage le long de la ligne de front. Mais Washington a aussi fourni largement l’armée ukrainienne en casque, gilet par éclats, petit armement, une masse considérable d’équipements de soldats qui ont permis de porter les forces ukrainiennes à un standard élevé.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *