Le gouvernement a accentué, tard lundi soir, la pression sur les syndicats et les directions des raffineries bloquées pour qu’ils négocient, alors que près d’un tiers des stations sont encore affectées par des pénuries de carburant en France, et que la CGT a reconduit son mouvement de grève pour mardi.
En dépit d’appels répétés du gouvernement à négocier sur les salaires et à cesser les blocages, la CGT et la direction de TotalEnergies ne sont pas parvenues à s’entendre. La grève se poursuit aussi dans les deux raffineries françaises d’Esso-ExxonMobil, après une réunion avec la direction qualifiée de « non-concluante » par Christophe Aubert, délégué syndical central CGT.
Confrontée à cette impasse, la Première ministre, à peine rentrée d’un déplacement à Alger, a réuni plusieurs ministres en urgence dans la soirée à Matignon. « Le gouvernement ne peut laisser le pays être bloqué », a commenté à l’issue l’entourage d’Elisabeth Borne : « Il continuera de prendre les mesures facilitant l’approvisionnement des stations comme il le fait depuis plusieurs jours », mais « chacun doit prendre ses responsabilités. Le gouvernement prendra les siennes ».
Selon un participant à la réunion à Matignon lundi soir, le scénario privilégié par le gouvernement serait que les négociations engagées chez Esso-ExxonMobil incitent TotalEnergies à aller à son tour vers des discussions, en saisissant la perche tendue par les appels syndicaux à négocier. Les blocages pourraient dès lors cesser.
Files d’attente, stations fermées
D’après cette source, aucune décision n’a été prise lundi soir quant aux mesures que pourrait prendre l’exécutif en cas de poursuite des blocages. « Toutes les décisions se prennent potentiellement rapidement », a-t-elle toutefois souligné.
Du nord au sud de la France, les mêmes scènes se reproduisent : des stations fermées, d’interminables files d’attente, des prix en hausse et le moral en berne. À 18h lundi, 29,4% des stations-service étaient en difficulté au niveau national (contre 29,7% à 15H dimanche), a indiqué la ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher.
« Si une légère amélioration est constatée dans les Hauts-de-France, (…) d’autres difficultés apparaissent sur le territoire, y compris dans des zones qui ne sont pas concernées par le mouvement social en cours comme la façade Atlantique », indique le ministère dans un communiqué.
Du côté entreprises, il y a de plus en plus de salariés qui ont du mal à arriver sur le lieu de travail, dans les zones rurales en particulier. Et on a aussi des entreprises qui, dans le cadre de l’activité professionnelle, rencontrent également énormément de difficultés aujourd’hui.
Jean-Eudes du Mesnil, secrétaire général de la CMPE, la Confédération des petites et moyennes entreprises
Stocks stratégiques débloqués
En attendant une embellie, le gouvernement a débloqué des stocks stratégiques de carburants, et TotalEnergies importe des carburants pour compenser l’arrêt de deux de ses trois raffineries. Ces mesures « ont permis d’augmenter les livraisons dans les zones en grandes difficultés : +50% en Ile-de-France, +35% en Hauts de France », a affirmé la ministre de la Transition énergétique.
Mais entre entreprises et CGT, le bras de fer se poursuit. Le syndicat demande 10% d’augmentation sur les salaires pour 2022, le géant de l’énergie ayant engrangé 10,6 milliards de dollars de bénéfice au premier semestre 2022, contre les 3,5% négociés en début d’année.
Seule concession à ce stade, TotalEnergies a proposé dimanche d’avancer des négociations salariales prévues en novembre au mois d’octobre (sans date précise), mais seulement à condition que les raffineries et dépôts actuellement bloqués reprennent le travail, un « chantage », a répondu la CGT lundi, laquelle a donc été suivie par les grévistes.